Avec plus de vingt ans de bandonéon dans les bras, Louise Jallu peut malgré son jeune âge légitimement s’estimer comme une musicienne accomplie. Il faut dire qu’elle a commencé à cinq ans, intégrant le réputé conservatoire de Gennevilliers, sa ville natale. La jeune fille grandie dans une famille mélomane – à la maison on écoute Monk, Bartók et Piazzolla – va trouver dans cette institution fondée par Bernard Cavanna matière à épancher sa curiosité pour le monde des musiques, tout en labourant de plus en plus profond le riche terreau du tango, une passion qui deviendra bientôt sa profession. Durant ses années d’apprentissage, elle bénéficiera des leçons de grands pairs considérés parmi les meilleurs experts, notamment César Stroscio et Juan José Mosalini qui prodiguent à la prodige les qualités fondamentales pour se faire un son dans le cénacle du tango : connaître son histoire et maîtriser l’instrument, sans pour autant endosser la panoplie de la simple copiste. C’est ainsi, mue par ce don d’ubiquité, cultivant tout à la fois un désir d’expérimentation tout en s’encrant résolument dans une longue tradition, que Louise Jallu va peu à peu affiner son doigté et affûter sa plume, afin d’affirmer son expressivité tant sur le bandonéon que sur la partition. Pour avoir de multiples mentors, citant parmi ses maîtres à jouer Anibal Troilo, Astor Piazzolla, Máximo Mori, ou encore Dino Saluzzi, la jeune femme n’en est pas moins une personnalité singulière dans un milieu longtemps considéré comme machiste. Les temps changent, et cela s’entend. Pas même majeure, mais déjà titulaire de son diplôme d’étude musical et ayant glané le deuxième Prix de la catégorie bandonéon solo du Concours International de Klingenthal (Allemagne), elle décide d’ailleurs de fonder sa propre formation, Louise Jallu Quartet, tout en accumulant les collaborations en tout genre, auprès de la chanteuse grecque Katerina Fotinaki comme de Sanseverino, avec les jazzmen dont Claude Barthélémy et Claude Tchamitchian, sans oublier l’esthète argentin Tomás Gubitsch.